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Mangez vos poètes favoris
Poètes
Pères profonds qui êtes
debout à la dure-mère
bâbords corsaires
bois flottés
bois piégés
bois blanchis
par la fougue lente du corail
art arthropode
ficaires
langues sargasses
et claires bacchantes de calcaire.
Toujours plus de tiroirs à ce pauvre cerveau
La bergère lui cède, le secrétaire empire
Deux rideaux qu’un rayon déchire
La clisse jaune de l’enclos
(mais quelque chose est beau de l’air)
Or toi martyr lassé d’ardeurs et d’Ardennes
marcheur un beau
désert s’est ouvert sous tes pas
la plaie que tu recouvres médite sa gangrène
enfin ta bouche a soif
pour l’Harrar tu renais, irradies et ruisselles
grilles tes pierres à feu
sécheresse miraculeuse
mirage du mica dans un cristal de sel.
tu as bien fait de partir, Arthur Rimbaud … (René Char)
Ce scribe mal armé
d’une botte de roseau
à l’entrée du désert
la tombe de la momie l’y terre
mais l’herboriste est fan
de l’onguent des délices
formules hermétistes
mystères
glyphes de pyramides
pour des futurs spéculaires
à elliptique éclipse
Langue cime
La voix inquiète qui harangue
Le cœur dans le pas du marcheur
Aspire au trismégiste espace
Solitude récif étoile
La bouche à balbutier sa liesse
Qu’importe. Qu’elle soit de notes de portée médiane tangentes à l’oreille de l’homme, entre soupir et porte, d’aigu de gente Diane aux graves de bégum. Qu’importe. Qu’elle porte en elle la quinte (la floch, la coloquinte, celle du catarrheux) la tierce et la septième – les charmes de l’impair – la laine du verlan qui démaille Verlaine.
Elle
l’abeille
la fausse libre
à l’aval erre / itératif envol
du pôle du pistil
aux marges arasées
Et toi ! Ardente ruche sa grammaire
qui bourdonne toujours à l’épaule d’un toit
divise
chez la phraseuse fauve
l’incise du grégaire
sa cause
par les angles du zinc.
Allons
à table
œil prend ta cuiller
pain miche
eau
en cruche
et nos amours
ce plat tonique
cuisse de volaille ravie
mise au four
l’amarante tripée
balsamique
l’entraille de sa vie
la veine bleue de sa clique
puis ce parfum rôti
de Plume
le fantôme
d’Henri
(Mangez vos poètes favoris)
Inspecteur de l’obscur
Henri
Mi frère mi chauve
Fausse lisseur des pôles
Barbare tiré d’Asie
Plume d’effraie
Teint jaune
Char, flèche, cordée, vierge sève.
L’injonction d’être, l’acharnée, celle que la nature nous tend dans l’abondance des branches, il fait fût de tout bois.
Quoi qu’il en saigne : verse.
De cette façon ultime d’être intense, audace, foudre d’ivresse, acte d’extrême lucide.
Contre le petit mal, l’ancienne fascine, un fagot qu’on ficelle de cents mots déjà morts qui morcellent l’ego.
Bris prosaïque, mobile sans vide, vent sans rumeur. Sans air de rien : grave, creuse, balance, livre sa ligne à libre lyre.
L’impalpable participe du maintien, la gravité du monde à l’attrait des morphèmes.
La langue reste de fil. Le poète pose une lance :
d’un tas de tablatures il tire : la harpe brève du mélèze.
Cap jeté à Dieu ne plaise
Erratique sillage
Narguant le nain qui reste à terre
Dérouler fils et cordages
Risée ganse ridée
A rayures fraise
Rire amarante et feu de lèvres
Soie maritime des lavatères
Cendrars m’a pris le bras pour charger l’œuvre rare
et ses malles d’orgueil et ses coffres d’ardeur
une traversée venteuse au soleil des salines -
l’éclat de son ciel d’huître
(et sa perle baroque dans la brume plombagine)
personne ne se souciait alors des mœurs ni des morts.
Dans la course de Leiris j’aime la tentation de la chevauchée, sa fièvre d’emballement équestre, de l’ivresse balbutiante à la lyre de la langue, dorure de cor, oralité d‘oracle, le rythme des sabots sous le pas des solives, le souffle libre et des trésors de force à la voûte de diaphragme, tout un décor de fibres et d’étoiles aux anfractuosités filandreuses, profondément filandreuses…
Que faire de ces mucosités dans l’encre qui orientent l’axe d’écoulement ?
(fourbis, biffures, fibrilles, frêle bruit)
Puisse le fil de l’eau
Horizon
Illuvial
Lisser le sol de joncs
Indissolubles
Peigner la pierre
Polir joncher
Etendre
J’accoste à ce coteau
A flanc de pente
Coupée d’eau
Claire
O
Trame
Translucide
Eclats des cimes
Terre
Pour le grand vent je fais la manche
Oh que ta vie au / grand air des plateaux
Hauts
Entre l’aztèque et l’hidalgo
Un mot de Paz et ce Mexique
M’excite mieux que mes dimanches
Celle qui court le chemin battant d’une autre rive
A perpendiculaire de fines échelles de schistes
Celle qu’affûte la lame des feuillages
Et disperse la voix humaine
Parlant dans la polarité des laves
D’échines décimées
D’obsédantes images
De la soif des reflets
A tenter d’habiter un pays plein d’arêtes
A peau froissée de vieille carte
Qu’on tourne pour en trouver le nord
(Vénus, simple fontaine
Tu parles avec les chiens
Et rêves dans les racines
Ta phrase minérale qui cisaille ma bouche)
L’oblique ardeur poursuit la crête
l’invisible pétrit la terre
à l’avers
le pli la voûte et tourne la rondeur
au terminateur des planètes
(Tout l'oblique vient de Guillevic)
Tags : poètes, poésie, poèmes
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