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Parler en langue
Réfute les bornes jusqu’à en perdre le chemin
en souvenir des voix :
y bruissent encore dans le zèle des feuilles de flagornes murmures, prières, moulures, obscures obséquieuses,
la moue multiple aux lèvres molles
flatte leurs langues déliées, frise-en le chœur, lisse la luette, le voile des palais, la voilette, la nef laryngée, l’escorte des salives
avec,
réfute le juge, la loi, la cour, mais garde le suave
Dénie la soif, la gloire
et jusqu’aux bras de la chemise.
Déjà vivant tu tiendras rongé de vers.
Telle ma mère l'eau qui se charge de tout et ne s'approprie pas
Nous encore debout, plantés en gué de langue, à l’aisselle du méandre, pleine eau plein flux plein les bottes du pêcheur plein courant de marée d’eau douce gonflés par des torrents d’orages mais retenus d’un fil de sève à la nervure des feuilles dorures cuivre criss écorce des aubiers.
L’organe transducteur lentement façonné d’autrui dans l’argile des racines puis patiemment détruit, pluie après pluie, cendre après cendre, ses couches de limon inversées par plissement ou découpées en tables, en tertre, en tumulus, en terres laminaires, en humus.
S’arrêter pour voir. Cesser de surseoir. S’arracher aux manque, soif, devoir, addiction, aspiration. Cadrer. Arrêter pour refaire, dedans, ou s’arracher pour dire, comparer, construire. Fixer. Défaire. Fixer. Trouver les mots qui collent, force forte, ligne claire, l’épingle du grand Paon qui le cloue à son liège.
Mort .
Vous croyez en bordure de vers la chasse à l’explétif incompatible avec la rime, l’orée, sa clairière, sa chute, sa falaise.
Vous verrez que bêtes et mots ont conscience du vide, qu’elles le signifient, qu’ils s’en tiennent d’instinct à distance, sauf poussées de force, de course, de transe, de frayeur.
Si le jeu des homophonies, cette version pas forcément snobe du contrepet était plutôt une ruse d’hypnopathe (métonymie , métonymie, métonymie…) pour laisser parler son cerveau dans la mesure où les mots qui viennent drainent à eux ceux qui les suivent (ou les harcèlent).
Une fausse adresse somnambulique, intuitive à l’usure, et fourbissant au jour une vérité fluette.Liberté avec la grammaire. L’intransitif transite la réflexion perd son miroir. Quelqu’un d’autre le gagne. On se retrouve plus tard, entre plusieurs, et, sauf l’urgence, rien n’a changé.
Dehors occlusive écluse!
L’en-dedans glousse et vomit
Fricasse tes fricatives
Resserre tes sifflantes
Détache tes dentales
Savonne-les de labiales
Slavonnes !
Luisante est la vague des langues
Et son sillage de salive...
Mesure de l’impalpable chair qu’on perd dans l’épaisseur des siècles, saint-jean-d’or l’icône, vertige des vestiges, sagesses saisissantes qui dessinent nos rêves.
Le delta s’abandonne au vitraillage du visible.
Maternelle, et pour en conserver la tessiture textile, la grande peuplade file le drap d’un ciel de ses linceuls de phrases.
Au rouet, la soie, la pille et les restes de reels.
(une nuit au dictionnaire)
Tout importe la bouche, la virgule la parenthèse l’italique le rythme la battue la salive la mesure la mémoire la chair palpable des mots chers. Quelque moi s’agace de ces pratiques.
Une sèche ascèse qui se contenterait du simple, de l’épure. Dans la vertu du simple qui parle du vertige.
Pliure où le concave vire au convexe. Forcer le verbe pour voir ce qu’il a dans le ventre. A accentuer la courbe : creusement complexe illimité de la matière modale mouvant débit du sens vortex dérive des mots en caillots de grenaille, limaille, et jet d’encre.
Par amour, manquer de le tuer, le saint débit, le don paisible.
Ce qu’elle cherche en fait c’est un sésame, une phrase à faire céder les issues d’ici-même, le secours d’une sortie, une porte dérobée au bazar de Babel. L’ivresse du moulin à prière, une gaie gayatri en idiome gallo. Sa délivrance en petites tortures.
Le ciel est-il crypté ?
A défaut de trouver l’exacte formule (le code et l’aloi) tournant et essayant chaque clé tour à tour. Quelques unes qu’elle aime, un réflexe fraternel, qu’elle réessaye sans cesse, dans l’émotion, en claire confusion d’affects.
La sœur des arbres avec son gros trousseau.
Pour champ de chasse choisissons
Un lexique à mesure de sa solitude
Dans la foule des fleurs, des phrases et des mouches
Une foule ordinaire
Bien indifférente
Quoique saine, et duveteuse derrière les ailes
Faisons-nous
Le masque transparent du dormeur
Le pas septième du faucheur
La peau pierreuse du lézard
Qui ne palpite que sous l’aisselle
Restons attentifs
Ne précipitons rien : ensuite soyons vifs
Et travaillons finement pour l’exacte formule
L’aloi
Ceci qui nous sied en bouche
(le festin de l’araignée)
Le mot quand il circule à proximité du versoir.
Lourd de ses racines, bardé de son génome, tout prêt à clapoter ses bribes de phonèmes.
Le mot et ses cinq sens. Toutes ses liaisons sont bivalentes.
On croit qu'on fixe une fistule de ficaire mais chacunes d’elles encore sinuent, sous-jacentes, labiales derrière la vitre.
Ça commence dès le miroir et se propage jusqu’au lexique, chaque liasse bruissant morphèmes bivalves et lèvres d’algues.
En quoi donc la trace pourrait-elle ancrer, dans quel sable ?
L’objet qui s’appelle, l’objet sans nom.
L’opérant
Celui dont l’opérance n’a pas de nom.
Les croisements qui en résillent.
Des strates de langues techniques.
L’autre en tant que champ de forces
Champ d’action
La masse qui nous tord
La courbure qui voile.
Seule la vérité restant inqualifiable.
Chercher, dans un vocabulaire labile et suffisamment semi-conducteur, dans la terre rare des vers, quelque chose d’assez vif pour en tenir la ligature de l’ion.
Les sciences troussent les lettres
Les lettres pillent le peuple
Les publicistes les prostituent
Le peuple cuisine les restes
Les poètes les passent au gril
Tous les hâbleurs s’en délectent
Les locuteurs les usent
Des étrangers s’installent
Des Lazare reviennent
Quelques collectionneurs collectionnent le rare
Ceux qui cherchent à nommer fouillent dans les racines
(les mœurs, chez les mots)
Comment le langage, artefact d’artefact –
approximation d’une forme déjà impure,
le percept – cette seconde main - peut-il prétendre à la justesse ?
Il y prétend.
De toute sa vanité de verbe.
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