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    Je t’aime pays comme une grosse bête mouillée qui attend stoïquement la neige, les yeux mi-clos. 

    Tes filles les vaches ont la couleur des mottes. 

    Tes ravines suintent l’herbe jaune, la corne lisse, le bois noirci .

      

     

     

     

     

     

     

    Nid d’alouette des dunes d’herbes

    Laissé à la licence de l'air

    Et piétiné de neige

    Chaton ficelle frisson jaune

    tu perds au vent le feu de tes brindilles

    Le cœur de ton soleil de chaume.

     

      

     

     

     

     

     

     

     

     

    Elle crisse ses cents crayons de bois

    sur mes rousses hérissures

    et la corne de mes sabots

    son rire de jument pie bleu

    à la gencive du muret

    car toutes les crinières du jour

    n’ont guère raison d’elle

     (la neige est dans mon pré)

     

     

     

     

      

     

     

     

    Fantômes sans chaîne

    Beaux draps de ce massif central

    La vierge neige au pied du chêne

    S’empreinte des traces du cheval

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

    La blanche ensommeilleuse

    Sa Solitude des fuseaux

    La pente des montagnes 

    en nappes somptuaires

    Lisseuse enfouisseuse affameuse

    d’oiseaux

    Le salut de la musaraigne

    Le règne de la phalène en suaire

     

     

     

     

      

     

     

    Horizon monochrome ô

    Cristal intact

    Parfaite ville d’eau

    Pas d’autre bi ou quadrupède tache

    Dameuse estafilade

    Pas d’autres ébréchures que celles dues au föhn

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

    Qui peut mieux que l’hêtre lisse

    aux extrêmes rousseurs

    dire en étain d’écorce le torse des coursonnes

    l’essence 

    des lentes virulences

     

     

     

     

     

     

     

     Monde nappé d’étoiles chues

    (le cataclysme fut indolent)

    Ceux qui restent sont méconnaissables

    Etouffés émoulus fourbus

    D’abord reviennent les corps des grands genets noyés 

    à fleur de relief

    le blanc désert est roi mais son royaume est bref

     

     

     

     

     

     

     


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    A parler du corps

    encore parler du corps

    si tu veux ces maux à mots couverts

    ses assiettes et ses verres

    sa table, ses cinq commensaux

    le sixième et le non-sens

    en dernier ressort, en dessert.

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

      

      

     

     

    Chaque fois une autre

    et subtilement identique architecture

    de mieux et de pires

     

    (il est probable que le pire gagne)

     

     

     

     

     

     

     

     

     

    Je suis de ce navire qui épouse mon corps.

    Je tresse je frotte je tors je tangue je chavire.

    Rarement je capitaine

    La toile plisse le poids déplace la masse des appuis.

    Tout ce qui peut se ploie.

    Tout ce qui grève grince.

    Tout ce qui sangle cède.

    Seul le temps s’écoule de ces infimes plaies.

     

     

     

     

     

     

     

     

     

    Des phosphènes de fièvre.

    Des dedans qui deviennent dehors des seuils de Moebius à l’éternelle intériorité expectorée en boucle

    Support

    Surface

    Orage orange

    Boréal

    Vertige complémentaire

    Vortex médullaire

    Et aucune pierre de touche pour faire cesser la chute.

     

    - Et vous, qui vous soulage ? La nuit ?

     

     

     

     

     

     

     

     Mes genoux soyez brefs

    et veuillez préciser l’adresse

    N’hésitez plus sans cesse entre les flammes

    et les archanges

    à la rotule couronnée

    je ne suis dans ce bas relief

    que quant-à-soi de roi de cartes

     

     

     

     

     

     

     

    Tangible poreux

    Fissile texture

    Très visible mirage

     

    Hachures  -  échelle humaine

     

     

     

     

     

     

     

    Il y a quelque chose d’irréductible entre son apparence et soi, et c’est seulement dans l’abandon à la multiplicité intérieure qu’on approche quelque peu de leur vérité commune.

    Toute cette ardeur du vif à l’assaut de l’intuition d’un seul.

    La fracture est première, spéculaire et ultime.

    Entre nous rien de plus que le commerce de la chair.

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

    O corps grand intrigant

    Je décode de la codéine

    J’aspire à l’aspirine

    Qu' importe les méfaits

    Quand je cherche l’effet

    Ras le gant

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

    Mon petit pied

    Ma main hors paire

    La belle fraternité de dix nonnes de nacre

    Salut à mes extrémités

    (ma grand’mère disait : il fut un temps où le monarque était aimé de ses sujets)

     

     

     

     

     

     

     

     

     

    Une mouture inquiète – un inquiétant mutisme.

    Que dire, fine moulure de poudre, marc à la foudre discrète : l’entrisme des tortures, l’extase des systoles ?

    La ligne de fuite à l’abandon des bandes –  la fractalité du muscle, la hiérarchie des fibres,  la cohérence des faisceaux.

    Tout pourrait céder à la mire.

    Et l’axe du laser spirite déconstruire pièce à pièce  l’architecture  de l’espèce, chaque veine rongée de vrilles.

    Tu tires tu tries tu délies tu déligotes, ordinant là tes derniers prêtres avec l’onction de l’heure et la courbe du calice.

    Que tombent les tensions qui cerclent l’acier, les cordages, les nerfs du bœuf, la peur première, l’œil injecté des abattoirs.

    Que tombent ces viscères et avec elles toutes les misères du monde.

    (entrailles, aruspices)

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

    Rien. Le monde ne s’épuise jamais.

    On peut tout vider fermer les sens en volets de persiennes.

    Il reste le dernier territoire de l’île, l’obsidionale, la grande plaine des grands muscles, la fissure, la ruche.

    Et le vent !  le souffle qui plisse, le vent qui baigne, l’axe de la moelle, le pont des fractures, l’auberge du genou…

     

     

     

     

     

      

     

     

     

    Malgré le solipsisme se tiennent l’infus en lierne

    le lierre en fût

    des cathédrales de feuilles signées d’un sceau de cierge et d’un faisceau de fièvre

    le javelot incendiaire qui se tire en javelle

    la falarique en feu qu’on pique aux murs de brique en attendant l’assaut.

    (nos guerres intestines)

     

     

     

     

     

     

     

     

    La mort que je serai est déjà là petite.

    Endogène.

    Volubile.

    Vous périssez par quoi vous avez vécu.

    Les chiens ne font pas des chats.

     

     

     

     

     

     

     

    La mort vient de dedans

    Je revendique ma part bactérienne

    Je m’y cause,  bien que son intelligence épidémique soit supérieure à mon espèce humaine

    Je donne chair à l’in trus

    Je suis sa manifestation

    Je suis sa chair à canon

    Je l’incarne à cette échelle

    Fungi virus archées

    en miette de la cellule

    tout ce qui code de l'espèce.

     

     

     

     

      

     

     

     

     

     

    Entrer dans tous les instants du corps.

    Dans la danse de leur rythme complexe – l’entrelacs de ses rythmes.

    Chemin mouvant à parcourir – peut être de mieux en mieux connu. Peut-on dire qu’il ne mène nulle part ? D’une certaine façon dans un nulle part d’infinités.

    L’infinie conscience qui ne parle que vive.

    Si le champ est borné l’infime, lui,  est sans borne, et toujours plus précisable dans la nomologie :

    Monde, intarissable diseur de loi.

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

      

     

     

     

     

     

     

    En tournant l’attention vers le corps il s’avère un autre monde arpentable et pourtant indescriptible, tout parcouru d’itinéraires aux simultanéités sidérantes.

    La quatrième dimension est la conscience qui coud, qui tresse le fil du temps à sa texture d’espace.

    Taiji : Le cerveau à l’œuvre dans ses recoins qui sont des gestes. L’attention convergeant aux points qu’on disait névralgiques.

    Correspondances des équilibres. Prédominance du circulaire.

    Dans le sillage du gouverneur, son itinéraire en réduction concave. C’est dans l’échange de ces données mouvantes que quelques dons s’échappent de l’abondance des possibles.

    En posture assise, la détente musculaire débouche sur la découverte de l’axe qui surgit de la jungle des fibrosités intérieures : après les frondaisons de langues et de feuilles, en un chemin furtif,  tel Angkor émergeant des forêts tropicales.  Une superposition de ses forces minimales, une sinuosité souriante, des espaces luminescents, du jour, du chaud, des sèves verticales.

     

     

     

     

     

     

     

     

     

    Le temps d’un corps, son rotor, et loin, un point d’épiphanie, fut-il inorthodoxe, infime décadrage de plans. Un décor d’avant l’aube de la suprématie des ondes, à l’est des écluses de l’hertz. Il s’agit comme toujours de rejoindre l’origine du carrefour, alors que tout était encore matière. Des verstes à endosser pour le delta lointain de l’Amour.

    Au vent  un printemps, un frémissement de fin de gel, passé au grand ralenti des steppes.

    (synopsis pour un film fleuve)

     

     

     

     

     

      

     

     

     

     

     

      

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     


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    Ces laies tracées dans l’espace intérieur

    ces coupes claires

    ces sentiers aux embranchements sylvestres

    qui mènent au cœur d’angles morts

    ou vifs

    à des autels

    à des cabanes d’arbre à hauteur de mains

    Fruits, fleurs

    plans de cuisine

    siphons de vasques

    chemins qui ne mènent nulle part qu’à l’ailleurs (considérez le cas du lit et ses flagrants délits de songes).

    Les mêmes foulures témoignent

    les encrassures surenchérissent

    les écaillures cancanent (je prends quelques clichés) 

    Avouez que qui vit là ne cesse de s’enfuir

    (ou est-ce qu’on s’y déploie ?) ?

     

     

     

     

     

     

     

    Des cimes de polyester

    Des séracs à rayures

    Ruisseaux de plis dont le lit fait le lac

    Tout le reste du massif plié par le sommeil

     

     

     

     

     

     

     

     

    A l’orée des battants

    sur la proue des persiennes

    La vague automobile

    La cloche des pontons où s’arriment les heures

    L’aileron d’hirondelle

    Dont l’aigu tombe en vrille

     

     (les souffrances ignorées de l’hyperacousique)

     

     

     

     

     

     

     

    L’instant est prosaïque. Il cliquète du poids des fourchettes, du pyrex de la vaisselle, une ligne brisée que ne surplombe que le crissement des freins et ceux de l’hirondelle. Plus bas, il grumelle son tissage, il bouclette en moquette et glisse dans la rayonne, en petits reflets bredouilles, en moires, en rumeurs.

    (le repas)

     

     

     

     

     

     

     

    Le lointain tel qu’il meut

    sa ville

    sa courte corde sa corne suave 

    mouvements

    sur les bords de l’inouï

    l’écho courbe bâti de ses anciens remparts

    l’usage d’un jeu molaire

    à la vièle de pierre

    et zinc - des toitures à revoir 

    trottoirs

    et résonance des regards

    tessiture phonolithe au sabot des murailles

     – ferme sainte  – forme ceinte

    disparition

    dans l’élégance des façades.

     

     

     

     

     

     

     

     

    L’angle de zinc

    Son bleuté

    Le ton tendre qu’il prend mouillé

    Le plastique de ses manches

    La pente des gouttières

    Le bulbe un peu bulgare

    Chef-d’œuvre du zingueur

    L’angle du zinc

    Son triangle

    Ses cônes de patelle

    Ignorés de sa sœur de l’ardoise

    La cendre qui manque à la tuile

     

     (Pour l’amour des toits)

     

     

     

     

     

     

     

     

    Patère austère

    Pattern Auster

    Par tous les cintres

    Qu’on pend à longue

    Heure de temps

    Le sac prend son regard d’en d’sous

    Et la lumière est vache avec ses rides

    La manche fait sa poche

    Le col fait sa pioche

    La veste la chemise

    Mais la casquette rêve du large et de largesses

    Marines

    Où elle retrouverait ses galons de serre-tête

     

     

     

     

     

     

     

    Une tranquillité d’âme mais guère plus claire qu’un thé.

    Pluie.

    Le signe qui persiste au nadir de ce bol.

    L’idéogramme naquit du creux des porcelaines. Cueillette d’un vieux printemps tirée des pentes, des nuages, du long chemin de son négoce. La foule des paysages qui cache ses visages dans l’abondance des feuilles.

    Dehors, ce mimosa qui meurt garde une certaine allure.

     

     

     

     

     

     

     


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    Poètes

    Pères profonds qui êtes

    debout à la dure-mère

    bâbords corsaires

    bois flottés

    bois piégés

    bois blanchis

    par la fougue lente du corail

    art arthropode

    ficaires

    langues sargasses

    et claires bacchantes de calcaire.

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

    Toujours plus de tiroirs à ce pauvre cerveau

    La bergère lui cède, le secrétaire empire

    Deux rideaux qu’un rayon déchire

    La clisse jaune de l’enclos

     

    (mais quelque chose est beau de l’air)

     

     

     

     

     

     

     

     

     

    Or toi martyr lassé d’ardeurs et d’Ardennes

    marcheur un beau

    désert s’est ouvert sous tes pas

    la plaie que tu recouvres médite sa gangrène

    enfin ta bouche a soif

    pour l’Harrar tu renais, irradies et ruisselles

    grilles tes pierres à feu

    sécheresse miraculeuse

    mirage du mica dans un cristal de sel.

     

     tu as bien fait de partir, Arthur Rimbaud … (René Char)

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

    Ce scribe mal armé

    d’une botte de roseau

    à l’entrée du désert

    la tombe de la momie l’y terre

    mais l’herboriste est fan

    de l’onguent des délices

    formules hermétistes

    mystères

    glyphes de pyramides

    pour des futurs spéculaires

    à elliptique éclipse

     

     

     

     

     

     

     

     

    Langue cime

        La voix inquiète qui harangue

           Le cœur dans le pas du marcheur

               Aspire au trismégiste espace

                  Solitude   récif    étoile

                      La bouche à balbutier sa liesse

     

     

     

     

     

     

     

     

    Qu’importe. Qu’elle soit de notes de portée médiane tangentes à l’oreille de l’homme, entre soupir et porte, d’aigu de gente Diane aux graves de bégum. Qu’importe. Qu’elle porte en elle la quinte (la floch, la coloquinte, celle du catarrheux) la tierce et la septième – les charmes de l’impair – la laine du verlan qui démaille Verlaine.

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

    Elle

    l’abeille

    la fausse libre

    à l’aval erre  /   itératif envol

    du pôle du pistil

    aux marges arasées

    Et toi ! Ardente ruche    sa grammaire

    qui bourdonne toujours à l’épaule d’un toit

    divise

    chez la phraseuse fauve

    l’incise du grégaire

    sa cause

    par les angles du zinc.

     

     

     

     

     

     

     

     

    Allons

    à table

    œil prend ta cuiller

    pain miche

    eau

    en cruche

    et nos amours

    ce plat tonique

    cuisse de volaille ravie

    mise au four

    l’amarante tripée

    balsamique

    l’entraille de sa vie

    la veine bleue de sa clique

    puis ce parfum rôti

    de Plume

    le fantôme

    d’Henri

     (Mangez vos poètes favoris)

     

     

     

     

     

     

     

     

     

    Inspecteur de l’obscur

    Henri

    Mi frère mi chauve

    Fausse lisseur des pôles

    Barbare tiré d’Asie

    Plume d’effraie

    Teint jaune

     

     

     

     

     

     

     

     

    Char, flèche, cordée, vierge sève.

    L’injonction d’être, l’acharnée, celle que la nature nous tend dans l’abondance des branches,  il fait fût de tout bois.

    Quoi qu’il en saigne : verse.

    De cette façon ultime d’être intense, audace, foudre d’ivresse, acte d’extrême lucide.

    Contre le petit mal, l’ancienne fascine, un fagot qu’on ficelle de cents mots déjà morts qui morcellent l’ego.

    Bris prosaïque,  mobile sans vide, vent sans rumeur. Sans air de rien : grave, creuse, balance, livre sa ligne à libre lyre.

    L’impalpable participe du maintien,  la gravité du monde à l’attrait des morphèmes.

    La langue reste de fil. Le poète pose une lance :

    d’un tas de tablatures il tire : la harpe brève du mélèze.

     

     

     

     

     

     

     

     

    Cap jeté à Dieu ne plaise

    Erratique sillage

    Narguant le nain qui reste à terre

    Dérouler fils et cordages

    Risée ganse ridée

    A rayures fraise

    Rire amarante et feu de lèvres

    Soie maritime des lavatères

     

     

     

     

     

     

     

     

     

    Cendrars m’a pris le bras pour charger l’œuvre rare

    et ses malles d’orgueil et ses coffres d’ardeur

    une traversée venteuse au soleil des salines -

    l’éclat de son ciel d’huître

    (et sa perle baroque dans la brume plombagine)

    personne ne se souciait alors des mœurs ni des morts.

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

    Dans la course de Leiris j’aime la tentation de la chevauchée, sa fièvre d’emballement équestre, de l’ivresse balbutiante à la lyre de la langue, dorure de cor, oralité d‘oracle, le rythme des sabots sous le pas des solives, le souffle libre et des trésors de force à la voûte de diaphragme, tout un décor de fibres et d’étoiles aux anfractuosités filandreuses, profondément filandreuses…

    Que faire de ces mucosités dans l’encre qui orientent l’axe d’écoulement ?

    (fourbis, biffures, fibrilles, frêle bruit)

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

    Puisse le fil de l’eau

    Horizon

    Illuvial

    Lisser le sol de joncs

    Indissolubles

    Peigner la pierre

    Polir joncher

    Etendre

     

    J’accoste à ce coteau

    A flanc de pente

    Coupée d’eau

    Claire

    O

    Trame

    Translucide

    Eclats des cimes

    Terre

     

     

     

     

     

     

     

     

     

    Pour le grand vent je fais la manche

    Oh que ta vie au  /  grand air des plateaux

    Hauts

    Entre l’aztèque et l’hidalgo

    Un mot de Paz et ce Mexique

    M’excite mieux que mes dimanches

     

     

     

     

     

     

     

     

     

    Celle qui court le chemin battant d’une autre rive

    A perpendiculaire de fines échelles de schistes

    Celle qu’affûte la lame des feuillages

    Et disperse la voix humaine

    Parlant dans la polarité des laves

    D’échines décimées

    D’obsédantes images

    De la soif des reflets

    A  tenter d’habiter un pays plein d’arêtes

    A peau froissée de vieille carte

    Qu’on tourne pour en trouver le nord

     (Vénus, simple fontaine

    Tu parles avec les chiens

    Et rêves dans les racines

    Ta phrase minérale qui cisaille ma bouche)

     

     

     

     

     

     

     

    L’oblique ardeur poursuit la crête

    l’invisible pétrit la terre

    à l’avers

    le pli la voûte et tourne la rondeur

    au terminateur des planètes

     

    (Tout l'oblique vient de Guillevic)

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     


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  • Mer

     

      

     

    Ce n’est pas par hasard que les émotions ressemblent à la matière.

    Et presque insupportable de se tenir en face, à la jumelle, dans le déferlement de la vague. Cette course qui submerge la vision dans une intraitable marée montante, joufflue, écumeuse, dévorante de roches (au Cabestan).

    Les plagistes replient. C’est novembre sur l’ouest et pourtant bleu derrière. Les crêtes, des horizons d’argent. Le raz de Sein infime au fil d’acier flottant.

    Cartes postales, photographies verbales.

    Les émotions imitent la dynamique des fluides c’est pourquoi le poète est toujours tenté d’eau, d’amphores emphatiques aux métaphores marines.

    La métaphore n’est jamais qu’un mode de duplication du vivant. 

    Méditer est lacustre.

    Les émotions sont vagues,

    Les raisonnements sont flagellaires.

    Eau qui donne à la perle son orient et son lustre.

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

    Estives de l’estran

    Archives des marées où repaissent des monstres

    d’essences halophiles et longue arborescence.

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

    Au recyclage des rebus secs

    miettes de crabes creux

    en lisière d’estran

    l’algue noircie et la meringue de seiche

    la crevette géante des plastiques sans tête

    le pas du goémon

    l’obsidienne des goudrons drapée d’ancien velours

    intact

    si le sel tient au vent

    le filet tient au vert

    en fait presque aucun insecte

    mais l’avant-garde des lavatères 

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

    Ecumante conquête des rochers: tous ces petits pays tranquilles ravagés d’escadres bombardantes, survoltées, cataclysmiques. Rafles sur les mogottes moussues.

    Sous un soleil inca, torrents crevant les lacs tranquilles, huttes berniques, patelles au levant sable passées au lance-neige carbonique tirée des profondeurs alcooliques de son bleu.

    Puisse-t-on, sous l'assaut de longues lames fouissantes à l’aisselle du rocher, tenir un monde par dessous !

    Inonder, inonder, maître mot de marée.

    Cyclique blitzkrieg, putsch bègue à la bouche de la grande liquide dont seules quelques peuplades frontalières s’accommodent – réduite prise au flux, maîtrise du tirant d’eau – cette fausse peau lisse au cuir rétractile, peu furtif reptile, lézard à mains marâtres…

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

    Marée

    Sourire des lunes

    Monde déversé en vertu des occurrences et des cycles

    J'en reviens où ta fraîcheur miroite.

     

     

     

     

     

     

     

     

     

    Là où la rive convulse

    Sa ligne vire au vert

    L’assaut des écritures à la suite du grand saur

    L’écume de son sceau sapide.

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

    Faïences du ressac

    fluages métamorphiques

    luisances de peau claire

    tonsures

    zostères 

    Des cartes dont on tirait les routes à la mule

    à la vache

    Falaise provisoire rivage qui se poldère

    s’ensème de fourrage

    doux son du blé amère

    saxifrage

    d’armure de chardons et d’arméries des dunes

    Est-ce la terre qui avance

    Est-ce que la mer recule ?

     

     

      

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

    La montée de la crithme à la chaussée pierreuse

    Qu’elle est lente pour la marée

    Et fulgurante pour le lichen

    L’osmose orange

    Le zeste rond à la marge crayeuse

    Un flegme de patelle sous l’haleine de sel.

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

    La pousse crucifère fait le pourpier de mer

    et marque la limite à la criste marine

    là bas un seuil d’ancienne vague

    peigné de jonc

    lichen allume ton œil jaune

    l’algue - l’œillet amer

    le sel de l’armérie

    le vent

    l’écume œcuménique en brassent les espèces.

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

    La perce-pierre brise jusqu’au granit :

    Aussi pauvre soit son substrat (une maigreur de poussière)

    elle croît en criste et se creuse par la résine

    son sel salpêtre dissous en vernis de foliole

    La perce-pierre - celle qui compresse, fistule et ligature en lierre

    dès l’arborescence des racines,  elle survit à l’écume.

    Vipère perspicace elle troue le mur et tire du mou du minéral

    -  sa laitance - son festin lithophage.

    Prédateur botanique en frontière de systèmes, on la dit : Mercenaire de flore.

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

    Vague crête contre jour des rumeurs

    vent de terre

    toute horde de guerre dans la chute du décor

    mais l’épine crépitant de lumière

    sueur de sable

    dentures de sel

    seules armes dressées

    à l’aisselle de mille bras

    et l’infanterie de son ressac

     (la baie à la jumelle)

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

    Le temps se couvre juste à la fin de la montée des eaux. La grosse bulle d’eau étire sa masse à la rencontre du continent, le drap tissé de ses vapeurs. Là bas pressé en barre de cumulus, on fera plumes et volutes, ailes, couettes, perruques, et la colonne de vos orages.

    Ciel de traîne : îles,  dentelles d’air.  Sa terre à elle, la mer.

     

     

     

     

     

      

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

    Nommer les choses c’est toujours en germe l’économie de les percevoir. Ici la mer plutôt que cette innombrable digression de facettes, cette chaotique de turquoises.

    La jumelle en détache une pastille de jour. Abstract.

    Ce qui se meut de bleu et d’éclat.

    Nommer saisir s’approprier détruire. Destin très orthodoxe dans le rite d’écrire. De ce mensonge que naît-il ? Parfois le don d’un verbe traversant le deuil du tout-ailleurs, dans l’amaurose du reflet.

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     


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